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Déficience visuelle et développement moteur

Au delà des premières semaines de vie, la vision est un sens essentiel pour la compréhension de l'environnement et des relations spatiales entre les objets et les personnes, ainsi que pour la discrimination des caractéristiques des objets (taille, forme, orientation, etc.). Elle permet également d'intégrer l'information des autres sens et de développer des habiletés perceptuelles.

L'enfant veut toucher ce qu'il voit. L'enfant qui ne voit pas est moins motivé de toucher, incluant de manipuler ses propres mains. Comme il manipule peu, il intègre moins d'informations tactiles et stimule moins sa motricité fine. Ses mains demeurent d'ailleurs souvent fermées et ses bras passifs beaucoup plus longtemps que pour l'enfant voyant.

Notamment, ce n'est que vers 12 mois que l'enfant tendra spontanément la main vers un objet en réaction à un stimulus sonore. Ainsi, l'exploration active de l'environnement arrivera rarement avant le début de la deuxième année de vie.

L'information visuelle est aussi ce qui motive l'enfant à se déplacer et qui offre la rétroaction qui incite à l'enfant à corriger et à améliorer ses mouvements. Ce que l'enfant voit affecte la planification de ses actions et en son absence contraint l'enfant à l'espace que son corps occupe, restreignant son exploration aux objets près de lui avec lesquels il est en contact direct.

L'enfant avec une déficience visuelle peut avoir des difficultés à développer des concepts. En effet, sans l'apport de la vision, l'enfant doit apprendre à utiliser ses autres sens pour comprendre et interagir avec son environnement, mais ces sens ne sont pas disponibles aussi tôt et aussi efficaces que le système visuel.  L'enfant a donc besoin de plus de temps pour y arriver.

Les autres sens sont intermittents et surtout ne sont pas contrôlés par l'enfant. L'enfant reçoit des parcelles d'informations difficiles à interpréter. Le son sans l'information visuelle associée provient de « nulle part ». Ce n'est qu'au fil du temps est d'exploration tactiles que la distance et la réalité qui l'émet prendra forme.

Voici un exemple de ce qui se passe proposé par des auteurs (Fazzi et Klein, 2002) : L'enfant perçoit d'une part de la fourrure douce, un nez et une langue mouillés, une queue qui bouge, un son de jappement puis, d'autre part, le mot chien mais doit assembler tout ça de lui même en une représentation de ce qu'est exactement un chien. En bref, l'enfant perçoit les différentes caractéristiques sensorielles des choses sans jamais avoir l'image complète à laquelle les rattacher.

D'ici à ce que le concept du « chien » est vraiment pris forme, le chien ne pourra devenir un motivateur pour les déplacements. 

Parcours développemental

Il est difficile de prédire comment un enfant avec une déficience visuelle se développera par rapport à un enfant sans déficience visuelle, car chaque enfant est unique et peut avoir des expériences et des besoins différents. L'ampleur de la déficience visuelle, la présence d'autres troubles de développement et l'environnement dans lequel l'enfant grandit peuvent influencer le rythme d'acquisition des jalons moteurs. En général, les enfants déficients visuels vont fréquemment développer leur motricité globale et fine plus lentement, en raison de leur difficulté ou incapacité à percevoir efficacement le monde qui les entoure et parce que de nombreuses activités nécessitent une bonne coordination visuelle-motrice, comme attraper une balle ou découper.

 

L'apport de l'ergothérapie

L'ergothérapeute peut aider l'enfant avec une déficience visuelle à développer sa motricité globale et fine de différentes manières.  

  1. Une évaluation de la motricité : L'ergothérapeute peut effectuer une évaluation de la motricité de l'enfant pour déterminer ses forces et ses faiblesses et élaborer un plan d'intervention adapté à ses besoins.

  2. Des intervention individuelles ciblées : L'ergothérapeute peut proposer des activités de jeux individuelles pour renforcer les muscles de l'enfant et améliorer sa coordination et son équilibre. Il peut aider aussi l'enfant à prendre confiance et exercer sa mobilité en lui faisant vivre des activités avec des jeux mains sur mains (ex. place un gros anneau dans une main de l'enfant et une gross tige dans son autre main et guide sa main avec l'anneau vers celle avec la tige) ou pieds sur pieds (ex. l'adulte fait marcher l'enfant sur ses propres pieds en lui tenant les mains), en lui enseignant des techniques de déplacement autonome, par exemple au début de l'apprentissage en poussant une chaise et plus tard comme l'utilisation d'un bâton blanc ou d'un chien-guide.

  3. Des adaptations l'environnement : L'ergothérapeute peut analyser l'environnement de l'enfant et y apporter des modifications pour le rendre plus sécurisé et adapté à ses besoins. Par exemple, il peut enlever les obstacles potentiels et mettre en place des repères visuels tactile ou visuels (meubles hauts contraste) pour aider l'enfant à se déplacer de manière autonome et efficace. Il peut aussi suggérer des des jouets stimulants par exemple qui font des sons quand on les manipule et qui ont des variations de textures.

 

Idées pour aider l'enfant avec une déficience visuelle à développer sa motricité à la maison :

  1. Favoriser les activités sensorielles : Les activités sensorielles peuvent aider l'enfant à développer sa perception de l'espace et à mieux comprendre son environnement. Par exemple pour les tout-petits les faire sauter sur les genoux ou danser dans les bras d'un parent.  Vous pouvez lui faire explorer des objets en utilisant ses mains et ses doigts, lui offrir des jouets à toucher et à manipuler, lui lire des livres tactiles et ajouter des odeurs à certains jouets pour multiplier les stimulations. Par exemple, parfumer légèrement et différemment ses peluches en les lavant avec différents assouplisseurs). La pâte à modeler procure des stimulations tactiles et olfactives tandis qu'un bac de riz avec des objets enfouis dedans procure des stimulation tactiles et auditives.

  2. Encourager l'autonomie et la participation aux tâches de la maison : Incitez l'enfant à devenir indépendant en lui donnant la possibilité de faire des choses par lui-même, comme se nourrir, se déshabiller, s'habiller, se laver les mains... nettoyer des surface, participer à la préparation des repas etc. Cela l'aidera à développer sa confiance en ses propres capacités et à améliorer sa motricité fine.

  3. Pratiquer des activités physiques libres : Toujours sous supervision, les activités physiques dans des environnement sécuritaires non restrictifs (sans obstacles autour) sont intéressantes pour permettre à l'enfant de découvrir et d'explorer les possibilités de son corps et de développer sa force, son équilibre et sa coordination. Par exemple grand espace gazonné, plage, piscine, dojo matelassé..) 

  4. Procurer des jouets adaptés : Il existe des outils et des jouets adaptés aux enfants ayant une déficience visuelle, comme des jeux de construction en relief, des jeux de société tactiles, etc. Ces outils peuvent aider l'enfant à développer sa motricité fine et à mieux comprendre son environnement.

  5. Encourager la participation à des activités de loisirs : Les activités de loisirs, comme le sport, la musique, la danse, le chant ou les arts, peuvent être très bénéfiques pour les enfants ayant une déficience visuelle. D'une part, elles contribuent au développement moteur et d'autre part, permettent à l'enfant de développer sa confiance en ses propres capacités, de socialiser et de s'exprimer de manière créative. 

 Pour aller plus loin sur le sujet, tu peux écouter l'épisode 44 du podcast Bouger pour Grandir avec Pascale Patoureau ergo.

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Bakke HA, Cavalcante WA, de Oliveira IS, Sarinho SW, Cattuzzo MT. Assessment of Motor Skills in Children With Visual Impairment: A Systematic and Integrative Review. Clin Med Insights Pediatr. 2019 May 6;13:1179556519838287.

Bouchard, D., & Tétreault, S. (2000). The Motor Development of Sighted Children and Children with Moderate Low Vision Aged 8–13. Journal of Visual Impairment & Blindness94(9), 564–573.

Fazzi, D.L., Kelin, D. (2002). Cognitive focus : Developing cognition, concept and langage in Occupational Therapy for Children et Adolescents Case-Smith, J.  Clifford-O'brien. J. (2015). Elsevier

Chris Strickling : Impact Of Visual Impairment On Development  

P.S. C'est la première fois que tu me lis ou m'entends? Je suis une ergothérapeute canadienne avec 20 + d'expérience en pédiatrie et en enseignement de la perspective et des stratégies de l'ergothérapie à l'échelle internationale.

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